mercredi 28 février 2007

A Day in the Life

Hier matin, 7h, je me lève au chant de ce coq qui, matin après matin, salue la montée du soleil au-dessus du centre-ville...un peu comme si une basse-cours occupait l'arrière d'un triplex sur St-Denis. Réveil difficile, puisque la nuit avait été courte: pris par de puissantes crampes abdominales, je me suis retrouvé assis sur la toilette, complètement en sueur, nausées inclues, et me sentant près de perdre conscience. Serait-ce la fin? Il me semble qu'il aurait été peu glorieux de finir mes jours les culottes baissées, sur le sol d'une salle de bain de Dakar. Mais non, après quelques minutes (j'ai un peu perdu le fil du temps), j'ai réussi à rejoindre ma chambre. Je suppose qu'il s'agissait d'une petite intoxication alimentaire, mais sur le coup je n'ai pas vraiment aimé l'expérience.

Je procède à mes ablutions quotidiennes dans mon demi-bain, m'habille et déjeune, puis j'ouvre la porte à ma bonne qui va passer une demi-journée à passer le balai et 5 min à faire ma vaisselle ou, s'il s'agit de la bonne journée, va laver mes chemises à la main. J'ai bien un lave-linge, certes, mais bon il faut bien que je justifie son salaire, sinon la proprio pourrait lui couper. Soyons bon prince et créons de l'emploi!
7h40, je lève les pattes et me rends à mon bureau, où je m'installe à 7h45. Le bureau est vraiment loin de mon appart! Faut quand même monter les 3 étages, puisque je boycotte l'ascenseur. Évidemment, comme ils rénovent tous les étages en même temps, faut marcher dans du sable à l'intérieur comme à l'extérieur de l'immeuble. Le linge reste propre vraiment longtemps ici.


Rue de Dakar, vu du toit du bureau.
Le tas qui bloque la moitié de la rue, c'est du sable pour faire du ciment.


Comme j'ai procédé à l'acquisition d'une cafetière de projet (attention, elle produit 2 tasses à la fois! Le luxe, pour 60$...et c'était la moins cher, le modèle suivant étant à 100$) je peux maintenant me permettre de prendre un peu de caféine question de passer au travers de la journée. J'ouvre les fenêtres, évidemment, pour profiter de l'air qui est encore relativement frais - d'ici 2 mois la température va grimper suffisamment pour justifier l'utilisation de la climatisation, et 2 mois plus tard je vais devoir me traîner une serviette pour m'éponger - le bureau sera alors invivable jusqu'à ce que la clim ne prenne sa vitesse de croisière.

Photo de mon bureau et sa multitude de chaises.
On peut voir, au fond à droite la fière cafetière de projet.

Je passe au travers de ma journée en travaillant sur mon ordinateur, espérant que mon staff local fasse de même. Que nenni! Rien ne se fera si ce n'est pas moi qui est sur le clavier. Dur dur d'avancer tous les dossiers quand on ne peut pas déléguer à son équipe avec un infime espoir que le travail se fasse. Au moins, du côté de l'informatique les choses avancent tant à Montréal qu'à Dakar. Je râle donc parfois devant mon écran, tandis que dehors un mouton bêle devant une mini botte de foin. À chacun son quotidien. J'espère encore que les choses se placent, après un an...

Je vogue aussi de réunion en réunion, où tout se discute avec aplomb, prenant les résolutions les plus fermes mais où elles ne sont généralement pas suivies de résultat. C'est en étant dans un système bureaucratique français (avec en plus, probablement, un peu de modifications) qu'on se rend compte à quel point c'est lourd, et que personne ne veut prendre de décision afin de ne pas devoir en porter l'odieuse responsabilité.

Durant une pause, j'en profite pour parcourir le journal rapidement afin de connaître les résultats des élections et ses contre-coups. Wade, le président sortant, est réélu sans surprise mis à part le taux élevé - 57% au premier tour, alors qu'il y a 15 candidats. Son plus proche rival a moins de 15% des votes. Au moins, les élections ont eu lieu dans le calme sauf dans quelques bureaux de scrutins, et la sortie des résultats ne s'est pas accompagné d'émeute ou de manifestations. Certes, certains candidats ont bien indiqué leurs doutes quant au résultat, mais la population semble accepter son propre verdict.

De son côté, ma collègue qui vit son baptème africain, s'acclimate tranquillement à son nouveau milieu qu'elle trouve cependant chaud (non non, moi je trouve qu'il fait frais. Ha oui c'est vrai, d'où tu viens il faisait -20 il y a 5 jours) et qui sent l'essence (ha? Je ne m'en rends plus compte).

Petite gargote à ciel ouvert où les gens peuvent déjeuner
et prendre l'Ataya, le fameux thé à la menthe sénégalais.


Après le travail, retour à l'appart pour chatter un peu avec les collègues et les amis, puis on décolle vers les 20h pour aller souper. Ce soir, ce sera de l'Italien! Lundi, nous avons rencontré deux Québécois qui se sont réfugiés à Dakar pour 10 jours. Ils avaient quitté la ville de Kamsar, en Guinée, pour passer le weekend à Conakry (capitale du même pays)...le destin en avait décidé autrement! Ils ont dû évacuer la ville sous le feu nourri de soldats debouts sur le camion dans lequel ils ont été amenés à l'aéroport, où ils ont pu prendre un avion pour Banjul, en Gambie, puis un bateau pour Dakar. Au moins, les tirs n'étaient pas dirigés vers eux, mais les balles perdues s'en foutent toujours un peu, alors valait mieux évacuer. Apparemment, ils ont rempli l'avion tellement rapidement qu'ils ont fermé la porte alors que des gens étaient debouts sur l'escalier qui y menaient. Une dame qui avait pourtant donné 200$ pour corrompre un membre de l'équipe de sol a d'ailleurs dû attendre le vol suivant. Comme quoi le crime ne paie pas toujours. Fait cocasse, au restaurant italien tout le monde a pris des pâtes Thaï...même leurs épouses, deux guinéennes au demeurant charmantes. Le calme étant revenu, ils repartaient aujourd'hui même pour Conakry.

Retour à la maison vers les 23h...un peu de lecture et hop! au lit. Le lendemain sera une journée de menus plaisirs et de légères frustration, comme d'habitude, au son à demi-hypnotique des appels à la prière.


On repeinture les façades, les travailleurs attachés
avec une corde simple autour de la taille.








samedi 17 février 2007

La rase campagne

La campagne présidentielle a été amorcée depuis deux semaines au Sénégal, mais c'est le calme plat à Dakar...Pas de manif, pas d'émeute, pas de chasse à l'homme, pas de couvre-feu, pas de tirs de mitraillette. On pourrait être à Hérouxville que les passions ne seraient pas plus intenses.

Oui, les discussions politiques accaparent une bonne partie de la journée de travail et des soirées des Sénégalais. Oui, les affiches sont souvent arrachées, la colle à peine sèche. Je me serais attendu à plus d'action...surtout après le message de panique de l'ambassade dont je vous parlais il y a déjà une semaine. Remarquez, on n'a qu'à ouvrir le journal pour se rendre compte que ça brasse un peu plus en région: "Le meeting de Landing dispersé à Thiès", "Un militant poignardé à Diourbel", "Deux maisons de responsables socialistes brûlées à Guinguineo"...

Ou encore ce jeune homme qui se fait trancher les doigts d'une main, par un agile coup de machette, lors d'une rixe entre les partisans de deux candidats, sur le terrain de foot qui allait en accueillir un troisième. Un peu de sang, donc, mais qui ne semble pas émouvoir la populace outre-mesure. J'imagine qu'ils sont bien contents de vivre au Sénégal et non en Guinée, où 123 personnes se sont fait tuées depuis que le Président a mis son couvre-feu lundi dernier, et tente par tous les moyens de sauver sa Présidence (dictatoriale), attaquée de toute part par les divers syndicats du pays (d'ailleurs en grève générale illimitée).

Remarquez ici, contrairement à notre démocratie pure et saine, les débats de fond font place aux attaques personnelles et démagogiques...imaginez, c'est comme si nos politiciens se traitaient de drogay (quand même, qu'est-ce que je suis fort) ou de mouton incompétent, ce qui serait inconcevable. Il faut dire que comme les 15 candidats disposent de 5 min de message télévisé par jour, on peut s'attendre à ce qu'ils procèdent à une série d'attaques afin de ne pas avoir à défendre leur plate-forme électorale.

Enfin, selon mes collègues sénégalais, les candidats vont tranquillement se diriger vers Dakar pour terminer la campagne ici. J'imagine que la semaine sera plus excitante et que les messages de l'Ambassade vont s'accumuler dans mon courrier indésirable.

De mon côté, c'est la routine habituelle. En fin de semaine dernière, j'ai accueilli mes deux travailleuses sociales qui remplacent mes regrettées Triflus. Elles le font d'ailleurs très bien. Pour leur faire plaisir, je leur ai fait un dîner à la québécoise (belle poutine avec simili fromage en grain - edam coupé en dés - dont la principale lacune était l'absence de skoui-skoui sous la dent), et un souper classique: un Pad Thai, plat thailandais par excellence, préparé par 3 Québécois en sol africain avec des arachides sénégalaises, des pâtes de riz viet-namiennes et des champignons de Paris provenant des Pays-Bas, le tout mélangé dans un grand bol Made in China, et arrosé de vin italien ou sud-africain et accompagné de pain français acheté dans une boulangerie libanaise. On est internationaux ou on l'est pas. Faut s'assumer! J'imagine que c'est ça, la mondialisation à l'échelle individuelle. La veille on avait d'ailleurs aussi arrosé la soirée un peu trop, et partagé l'ataya (le célèbre thé à la menthe (ou nana) sénégalais à trois services, dont le premier est amer comme la mort, le deuxième fort comme la vie, le troisième doux comme l'amour, comme on dit ici) avec le gardien de nuit de mon bloc.

J'ai aussi eu l'indicible plaisir de recevoir mon boss cette semaine, ce qui nous permet d'avoir des discussions pseudo-philosophiques sur les impôts et les femmes (et parfois séparément) en marchant dans la rue, tout en tentant d'éviter les voitures et les mobilettes, et en faisant d'élégants pas de danse afin de ne pas recevoir un coup de miroir d'un taxi qui passe trop proche...ou de regarder en passant ces fidèles qui, assis sur leurs tapis de prière de manière à bloquer entièrement une petite rue, lisent leur coran à 2 pas d'une grande artère archibondée où les vendeurs de babioles tentent de refiler aux touristes naifs des objets achetés à bas prix dans les magasins chinois, ou d'originales sculptures faites à la main qu'on peut trouver dans toutes les boutiques à ciel ouvert. Scène surréaliste, certes, mais qui fait partie du quotien dakarois.

vendredi 9 février 2007

Tous en élections!

Ce dimanche, 4 février 2007, avait lieu le lancement de la campagne pour les élections présidentielles au Sénégal. La campagne durera 3 semaines, les élections ayant lieu le dimanche 25 février.

Or, jeudi le 1er j'ai reçu de l'Ambassade canadienne un avis indiquant qu'une manifestation de l'opposition était planifiée pour le lendemain, et qu'il était recommandé d'éviter le plateau de Dakar...hmmm, j'habite et je travaille sur ledit plateau. Ça ne sera pas facile! Heureusement (mais malheureusement pour mes anecdotes), j'apprends le lendemain matin que la manif a été annulée.

Toutefois, lundi dernier les premiers signes de la campagne ont commencé à poindre dans la rue. Sur l'heure du midi, un long cortège se promenait en klaxonnant à tout rompre dans les rues de Dakar pour promouvoir la candidature de Idy. Évidemment, tout ce remue-ménage a bloqué les rues encore plus qu'à l'habitude (car comme vous le savez le trafic de Dakar est exécrable).
Le soir, je quitte le bureau et une belle affiche toute neuve d'un autre candidat avait été collé sur le mur de la Direction des impôts. Le lendemain matin, en arrivant au bureau, elle avait déjà été arrachée...elle a duré moins de 24h! Alors que chez nous les pancartes restent accrochées à tous les poteaux de la ville pendant au moins 1 mois après les élections...c'est là qu'on voit la différence. Ici les gens sont très politisés, beaucoup plus que chez nous. Beaucoup moins blasés. Il faut dire que la misère étant grande, les passions et les attaques se multiplient car l'opposition a le beau jeu.
Maintenant, j'aimerais savoir qu'est-ce que vous avez tous contre mon pied droit. Non je ne l'épile pas! Je suis peut-être moins velu sur les pieds et la tête que sur le torse et les bras, mais ça ne veut pas dire que ça peut donner des nausées...moi, je pense que vous êtes jaloux à cause de la mer derrière mon pied, alors vous avez concentré vos regards sur ce dernier....allez, retournez pelleter!

Vous voulez avoir la réponse officielle au jeu dont vous êtes le héros #1? J'ai compté 32 pélicans et 11 intrus. Évidemment, j'ai l'avantage d'avoir une photo plus grosse avec une meilleur définition, mais comme dirait Caliméro: Zé vraiment trop inzuste!

Je vous ajoute quelques photos supplémentaires de Saint-Louis, pour vous faire plaisir :)

Pêcheurs du village préparant leur filet avant le départ en mer

Coucher de soleil Saint-Louisien


Gazelle du Parc de Gueumbel provenant
d'un zoo en Israel...elle a probablement été convertie

Pélican en plein amerrissage

Jeu dont vous êtes le héros #2
Bonne chance!